Eterview Hélène Clemente d'inextenso conseil
Actuellement en charge du développement du pôle inextenso conseil, au sein d'une association d'éditeurs d'art français, Hélène Clemente est missionnée par la Direction du livre et de la lecture du Ministère de la culture pour mettre en place des outils de valorisation des éditeurs indépendants, dans un circuit interprofessionnel. Cette mission fait suite à la création d'un réseau de diffusion (inextenso diffusion en 2001) et à la constatation d'une dégradation rapide du réseau de commercialisation du livre de création.
Avec Inextenso Conseil et Inextenso Diffusion vous œuvrez pour l'édition indépendante... Pouvez-vous en quelques mots nous présenter ces structures et nous préciser en quoi elles intègrent les NTIC dans leurs réflexions et leurs actions ?
- inextenso est une association d'éditeurs d'art. Elle est née de la volonté de chacun des éditeurs de trouver une solution aux problèmes de diffusion (leur précédant diffuseur Sit' art ayant déposé le bilan) et donc de distribution.
inextenso diffuse aujourd'hui le catalogue des 12 éditeurs dans le réseau de la librairie de 1er niveau. inextenso, structure légère est distribuée par Volumen.
Comme pour tous les éditeurs de création, la nécessité d'avoir une visibilité en librairie est cruciale. Le chiffre d'affaire d'inextenso diffusion y est principalement réalisé. Les NTIC permettent d'assurer à nos catalogues une visibilité permanente, ce qui n'est plus le cas actuellement et physiquement en librairie. Du chemin reste à parcourir dans ce sens, mais nous progressons. Nous avons également besoin de conquérir un nouvel outil de travail, de parole et de réflexions. Cet outil, inextenso conseil doit être mis à la disposition d'une communauté d'intérêts : celle des éditeurs et des diffuseurs confrontés aux problèmes de commercialisation et circulation des ouvrages dans un contexte de concentration et de changements rapides.
Les NTIC nous offrent ces espaces dans la mesure de nos moyens et de nos capacités.
L'édition aujourd'hui c'est de la cavalerie : moins d'exemplaires mais toujours plus de titres ! Le réseau de commercialisation du livre est au bord de l'apoplexie ! La dématérialisation du livre, avec la numérisation et de nouveaux supports de lecture serait-elle, à votre avis, la solution, ou en tout cas une solution d'avenir ?
- La cavalerie, nous en subissons directement les charges !
L'actualité professionnelle d'inextenso conseil en rend compte régulièrement. Mais nous restons et survivons pour le moment sur ce champ de bataille. Nos éditeurs fabriquent des beaux livres ; ce que j'appelle des livres "sensibles" à tirage limité pour lesquels le rapport à "l'objet" livre est encore prééminent. Pour autant, nous sommes attentifs aux évolutions des supports tant sur le plan purement matériel (e-ink, e-paper...) que sur le plan économique ou juridique. Mais nous avons besoin de relais sur ces questions. Les éditeurs que je représente vivent dans l'urgence de leur pratique et n'ont pas le temps, l'énergie et l'occasion de côtoyer des personnes "aware" sur ces questions. C'est la raison pour laquelle, nous avons ouvert ce département inextenso conseil. Tisser des liens, s'auto-in/former pour comprendre les changements en cours tout en tenant compte des réalités physiques de la vie des livres. Une sorte de grand écart, finalement pour des éditeurs/diffuseurs interrogés sur leur capacité à s'adapter ou à résister. Quant à la dématérialisation du livre, qu'en dire ?
En mars dernier, à l'occasion du Salon du livre de Paris, une polémique, vite désamorcée, a failli éclater : il y aurait trop de petits éditeurs et ce serait eux qui seraient responsables de l'augmentation de la production et encombreraient les rayonnages des librairies... Eh oui ! Qu'en dites-vous ?
- Je répondrai très simplement en vous donnant les chiffres officiels publiés par le Syndicat national de l'édition pris sur le fichier exhaustif du livre. Sur les 3500 éditeurs identifiés à travers le FEL, les premiers 30 % des structures éditoriales (les plus gros en taille) représentent à eux seuls 96 % de la production de livres. De l'autre côté, les derniers 30 % représentent 0,3 % de la production.
Comment se positionne Inextenso par rapport à Calibre, le projet d'outil interprofessionnel pour la distribution de la petite édition, lancé à l'initiative du SNE ?
- Le dossier Calibre est en cours d'évolution. inextenso, dans le cadre de l'association Diffuseurs en création a posé les limites de son inscription dans un circuit du livre en proie aux crispations. Calibre est avant tout l'outil que les libraires attendent pour rationaliser leur rapport aux éditeurs non distribués. Logistique simplifiée et facturation centralisée… Mais Calibre n'est pas encore un outil éditeur. Les éditeurs non distribués utilisent d'ailleurs la plateforme Prisme pour la province et les coursiers pour Paris. Leur site internet leur permet même de servir leurs lecteurs rapidement. De plus, la question des coûts logistiques (acheminement, pas de stockage, délais de traitement des commandes, retours...) est essentielle dans un environnement qui pousse ces petits éditeurs à imaginer leur propre niche (cyberlibrairie, servir le lecteur rapidement et directement, aménager des plateformes de stockages intermédiaires mutualisées...).
Mais comme inextenso conseil est très intéressée par toute proposition performante en matière de valorisation et circulation des ouvrages, nous sommes toujours attentifs à l'avancée de ce dossier qui doit se nourrir des réflexions des principaux intéressés.
Nous pensons que le marché du livre est à la veille d'une importante révolution... numérique. Nous considérons que le numérique est une chance pour le livre. La bibliosphère numérique est comme une nouvelle galaxie en construction. De nouveaux outils d'impression, de publication, de diffusion et de communication s'offrent maintenant à tous les partenaires, des auteurs aux lecteurs. Ces outils sont garants de la bibliodiversité et de l'indépendance, tant des auteurs que des éditeurs. Certes, les métiers de la diffusion peuvent s'inquiéter. Pensez-vous que nous arriverons un jour au modèle extrême : un auteur = un éditeur = un diffuseur ? Comment vous situez-vous par rapport à ce modèle ?
- Pour vous répondre franchement, dans l'environnement qui nous concerne, nous n'avons pas de vision claire d'un schéma idéal. Ce qui est important, c'est d'accompagner au mieux la création, de l'auteur jusqu'au lecteur. De militer pour que cette création puisse demeurer une source de développement pour la société dans laquelle elle s'inscrit. De faire en sorte que les chemins de traverse puissent générer encore plus de créativité. Et que le commerce à outrance et ses règles de rentabilité, de rationalisation et donc de nivellement par le bas ne viennent détruire cette perspective. Faire en sorte que ceux qui prennent des risques pour défendre les créateurs puissent s'y retrouver économiquement.
Se pose la question aussi de l'économie du numérique. Le numérique ne signifie pas automatiquement pour nous bibliosphère. Par exemple, lire un journal en numérique, c'est génial. Être obligée de lire les articles de fonds truffés de publicité, façon écran TV, ça l'est beaucoup moins. Lire que des vidéos/pub puissent être glissées dans des livres numériques également. Enfin, le numérique ne se prive pas (tout au contraire) des prescripteurs, des critiques qui sont aussi des diffuseurs, d'un autre type peut-être.
Nouvolivractu est principalement concerné par l'émergence de nouveaux appareils et systèmes de lecture (ebook, e-ink...). Comment devrait être pour vous, demain, l'appareil de lecture idéal ?
- L'appareil de lecture idéal demeure proche du format livre. On ne se refait pas... Nous sommes encore très "Gutenberg" ou tendance livres d'artiste... Mais je suis très intéressée justement par le procédé de l'e-ink et du papier électronique. Paginer un livre universel, lumineux et interactif. Pouvoir le fixer ou changer son contenu selon l'usage... Faire en sorte que des créatifs l'investissent... Malheureusement, nous n'en avons encore pas vu ni touché...
- inextenso est une association d'éditeurs d'art. Elle est née de la volonté de chacun des éditeurs de trouver une solution aux problèmes de diffusion (leur précédant diffuseur Sit' art ayant déposé le bilan) et donc de distribution.
inextenso diffuse aujourd'hui le catalogue des 12 éditeurs dans le réseau de la librairie de 1er niveau. inextenso, structure légère est distribuée par Volumen.
Comme pour tous les éditeurs de création, la nécessité d'avoir une visibilité en librairie est cruciale. Le chiffre d'affaire d'inextenso diffusion y est principalement réalisé. Les NTIC permettent d'assurer à nos catalogues une visibilité permanente, ce qui n'est plus le cas actuellement et physiquement en librairie. Du chemin reste à parcourir dans ce sens, mais nous progressons. Nous avons également besoin de conquérir un nouvel outil de travail, de parole et de réflexions. Cet outil, inextenso conseil doit être mis à la disposition d'une communauté d'intérêts : celle des éditeurs et des diffuseurs confrontés aux problèmes de commercialisation et circulation des ouvrages dans un contexte de concentration et de changements rapides.
Les NTIC nous offrent ces espaces dans la mesure de nos moyens et de nos capacités.
L'édition aujourd'hui c'est de la cavalerie : moins d'exemplaires mais toujours plus de titres ! Le réseau de commercialisation du livre est au bord de l'apoplexie ! La dématérialisation du livre, avec la numérisation et de nouveaux supports de lecture serait-elle, à votre avis, la solution, ou en tout cas une solution d'avenir ?
- La cavalerie, nous en subissons directement les charges !
L'actualité professionnelle d'inextenso conseil en rend compte régulièrement. Mais nous restons et survivons pour le moment sur ce champ de bataille. Nos éditeurs fabriquent des beaux livres ; ce que j'appelle des livres "sensibles" à tirage limité pour lesquels le rapport à "l'objet" livre est encore prééminent. Pour autant, nous sommes attentifs aux évolutions des supports tant sur le plan purement matériel (e-ink, e-paper...) que sur le plan économique ou juridique. Mais nous avons besoin de relais sur ces questions. Les éditeurs que je représente vivent dans l'urgence de leur pratique et n'ont pas le temps, l'énergie et l'occasion de côtoyer des personnes "aware" sur ces questions. C'est la raison pour laquelle, nous avons ouvert ce département inextenso conseil. Tisser des liens, s'auto-in/former pour comprendre les changements en cours tout en tenant compte des réalités physiques de la vie des livres. Une sorte de grand écart, finalement pour des éditeurs/diffuseurs interrogés sur leur capacité à s'adapter ou à résister. Quant à la dématérialisation du livre, qu'en dire ?
En mars dernier, à l'occasion du Salon du livre de Paris, une polémique, vite désamorcée, a failli éclater : il y aurait trop de petits éditeurs et ce serait eux qui seraient responsables de l'augmentation de la production et encombreraient les rayonnages des librairies... Eh oui ! Qu'en dites-vous ?
- Je répondrai très simplement en vous donnant les chiffres officiels publiés par le Syndicat national de l'édition pris sur le fichier exhaustif du livre. Sur les 3500 éditeurs identifiés à travers le FEL, les premiers 30 % des structures éditoriales (les plus gros en taille) représentent à eux seuls 96 % de la production de livres. De l'autre côté, les derniers 30 % représentent 0,3 % de la production.
Comment se positionne Inextenso par rapport à Calibre, le projet d'outil interprofessionnel pour la distribution de la petite édition, lancé à l'initiative du SNE ?
- Le dossier Calibre est en cours d'évolution. inextenso, dans le cadre de l'association Diffuseurs en création a posé les limites de son inscription dans un circuit du livre en proie aux crispations. Calibre est avant tout l'outil que les libraires attendent pour rationaliser leur rapport aux éditeurs non distribués. Logistique simplifiée et facturation centralisée… Mais Calibre n'est pas encore un outil éditeur. Les éditeurs non distribués utilisent d'ailleurs la plateforme Prisme pour la province et les coursiers pour Paris. Leur site internet leur permet même de servir leurs lecteurs rapidement. De plus, la question des coûts logistiques (acheminement, pas de stockage, délais de traitement des commandes, retours...) est essentielle dans un environnement qui pousse ces petits éditeurs à imaginer leur propre niche (cyberlibrairie, servir le lecteur rapidement et directement, aménager des plateformes de stockages intermédiaires mutualisées...).
Mais comme inextenso conseil est très intéressée par toute proposition performante en matière de valorisation et circulation des ouvrages, nous sommes toujours attentifs à l'avancée de ce dossier qui doit se nourrir des réflexions des principaux intéressés.
Nous pensons que le marché du livre est à la veille d'une importante révolution... numérique. Nous considérons que le numérique est une chance pour le livre. La bibliosphère numérique est comme une nouvelle galaxie en construction. De nouveaux outils d'impression, de publication, de diffusion et de communication s'offrent maintenant à tous les partenaires, des auteurs aux lecteurs. Ces outils sont garants de la bibliodiversité et de l'indépendance, tant des auteurs que des éditeurs. Certes, les métiers de la diffusion peuvent s'inquiéter. Pensez-vous que nous arriverons un jour au modèle extrême : un auteur = un éditeur = un diffuseur ? Comment vous situez-vous par rapport à ce modèle ?
- Pour vous répondre franchement, dans l'environnement qui nous concerne, nous n'avons pas de vision claire d'un schéma idéal. Ce qui est important, c'est d'accompagner au mieux la création, de l'auteur jusqu'au lecteur. De militer pour que cette création puisse demeurer une source de développement pour la société dans laquelle elle s'inscrit. De faire en sorte que les chemins de traverse puissent générer encore plus de créativité. Et que le commerce à outrance et ses règles de rentabilité, de rationalisation et donc de nivellement par le bas ne viennent détruire cette perspective. Faire en sorte que ceux qui prennent des risques pour défendre les créateurs puissent s'y retrouver économiquement.
Se pose la question aussi de l'économie du numérique. Le numérique ne signifie pas automatiquement pour nous bibliosphère. Par exemple, lire un journal en numérique, c'est génial. Être obligée de lire les articles de fonds truffés de publicité, façon écran TV, ça l'est beaucoup moins. Lire que des vidéos/pub puissent être glissées dans des livres numériques également. Enfin, le numérique ne se prive pas (tout au contraire) des prescripteurs, des critiques qui sont aussi des diffuseurs, d'un autre type peut-être.
Nouvolivractu est principalement concerné par l'émergence de nouveaux appareils et systèmes de lecture (ebook, e-ink...). Comment devrait être pour vous, demain, l'appareil de lecture idéal ?
- L'appareil de lecture idéal demeure proche du format livre. On ne se refait pas... Nous sommes encore très "Gutenberg" ou tendance livres d'artiste... Mais je suis très intéressée justement par le procédé de l'e-ink et du papier électronique. Paginer un livre universel, lumineux et interactif. Pouvoir le fixer ou changer son contenu selon l'usage... Faire en sorte que des créatifs l'investissent... Malheureusement, nous n'en avons encore pas vu ni touché...
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